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A l’heure où la question de l’identité – individuelle et collective- est au centre de tous les débats, le monde de l’entreprise n’y échappe pas. Une réflexion qui ne date pas d’hier, mais aujourd’hui inhérente aux nouveaux codes qui se profilent.
Un constat d’ailleurs partagé par le philosophe Pierre-Henry Tavoillot : « En matière d’identité, les sociétés traditionnelles avaient les réponses, mais ne se posaient pas la question ; les modernes se posent de plus en plus frénétiquement la question, et ont de moins en moins de réponses. »
Mais quid de l’essence d’une entreprise ?
Notion complexe et floue par excellence, celle-ci se construit dans le temps et repose sur de nombreux facteurs. A notre image, toute personne morale a une date de naissance, un nom et des caractéristiques bien singulières. Alors que la création d’une entreprise est une vulgaire affaire administrative, la création de son identité, elle, relève de l’imagination, de la personnalité et du « cœur » de son fondateur. Cruciale dans le développement d’une société, l’identité corporative concours en interne à l’engagement des collaborateurs, à la coopération, tout en constituant une base solide pour résoudre les conflits et prises de décisions. Tout aussi essentielle en externe, elle permet de véhiculer une certaine idée de ses produits et services, jouer sur l’attractivité, optimiser la notion de confiance et se démarquer de la concurrence.
Les mentalités évoluent
Éprouvé ces derniers temps par la crise sanitaire, le monde de l’entreprise connait une transformation profonde aux problématiques vastes. Télétravail, réaménagement des espaces, recrutement d’employés à distance, cette période post-Covid chamboule les usages et met sur le devant de la scène de nouvelles stratégies. Autrefois exclusivement assignés au principe d’optimisation des coûts, les espaces de travail sont aujourd’hui considérés comme de véritables leviers de performance. Plus de liberté dans les horaires, meilleure conciliation entre vie professionnelle et professionnelle, productivité inchangée voire améliorée, les bienfaits du télétravail ne sont plus à prouver pour une grande majorité. Si la crise a agi comme un catalyseur de tendances déjà présentes, elle a redistribué les cartes, sans doute plus vite qu’on ne l’aurait imaginé. Les entreprises ont plus que jamais besoin d’agilité et de souplesse au sein des ensembles qu’elles occupent. Face à la digitalisation massive et au risque d’affaiblissement de la culture d’entreprise, terreau de cohésion et de performance, les entreprises ont tout intérêt à repenser leurs espaces et offrir « au bureau » ce que les salariés n’ont pas en home office.
Comment épouser ce changement ?
Plus humain, plus ancré dans l’intelligence émotionnelle, le management collaboratif est aujourd’hui érigé en modèle à suivre, faisant de facto évoluer le regard porté sur les collaborateurs. Jadis considérés comme de simples exécutants dans l’inconscient collectif, les salariés sont en passe de devenir des consommateurs, des utilisateurs souhaitant vivre une expérience particulière sur leur lieu de travail. Si une course effrénée de baisse des mètres carrés est aujourd’hui engagée, il n’en reste pas moins que le bureau conservera toujours un rôle capital, et ceux malgré une part de distanciel.
Jadis espace de productivité au sens strict du terme, le bureau s’humanise pour devenir un tiers-lieu où la magie opère, un savant mélange entre culture d’entreprise, convivialité et créativité.
Dans cette optique, un réaménagement intelligent des espaces s’impose et qui nécessite de passer par une remise en question, une vision à long terme et une expression en 360 des besoins. Face à la complexité et l’éclectisme de ces enjeux, il est de bon ton de confier le « space planning » à des architectes programmistes qui sauront optimiser les mètres carré et insuffler un nouvel élan au cœur de l’entreprise. Travaillant de concert avec les interlocuteurs désignés, ces derniers vont avant tout conseiller et proposer une stratégie au plus près des attentes et méthodes de travail. Un sens de l’écoute conjugué à une interaction constante avec l’ensemble des services permet ainsi de limiter le manque d’adhésion, souvent à l’œuvre dans une conduite du changement mal accompagnée. Car les freins sont évidemment légitimes et nombreux : pertes de repères et de contrôle, les réaménagements suscitent craintes et interrogations de la part des employés auxquels il convient de répondre avec clarté, empathie et pédagogie. A l’heure où la demande en mètre carré diminue, et que le flex office a le vent en poupe, les économies réalisées permettent ainsi de dégager un budget suffisamment conséquent pour marquer le changement et le caractère disruptif de ce projet immobilier.
Dans une philosophie empruntée aux codes de l’hôtellerie, doivent coexister des espaces qui invitent au partage mais aussi à la tranquillité, tout en misant sur une uniformisation de la qualité du mobilier. Modulables et léger, il doit faciliter les interactions et permettre aux employés de vivre une expérience utilisateur sur mesure et à forte valeur ajoutée. Au programme : moins d’espaces dédiés aux postes de travail, mais davantage de lieux informels consacrés aux échanges.
Dans un monde où « l’individuel » est un principe de plus en plus prégnant, les entreprises doivent elles aussi, prendre le train en marche et s’accoutumer aux nouveaux codes. En somme, une organisation du travail adaptée qui permet au collaborateur d’évoluer dans un environnement accueillant mais surtout flexible au gré de ses journées, humeurs et besoins. A l’image d’un restaurant ou tout simplement d’une maison de famille, l’âme d’un lieu est avant tout et surtout les éléments qui la composent. Un cœur battant. Il apparait donc urgent de (re)donner l’envie de s’y rendre et de (re)créer ses propres rituels, avec une souplesse retrouvée qui fait la part belle à l’intelligence émotionnelle.
Dans un contexte fortement influencé par le management collaboratif dit « bienveillant », les entreprises qui tireront leur épingle du jeu seront celles qui concilieront habilement stratégie d’entreprise et besoins individuels…