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Encensées ou vilipendées, les allocutions de Greta Thunberg ne laissent pas indiffèrent. Le verbe haut et le geste large, la jeune activiste suédoise a mis les pieds dans le plat à l’ONU sur l’urgence climatique en 2019. Que l’on soit adepte ou non de son approche radicale, elle aura eu le mérite de sensibiliser les esprits L’heure n’est pas non plus à la demi-mesure à l’université du MEDEF qui a récemment été le théâtre de prises de paroles engagées et d’annonces de restrictions de la part de la classe politique. Face aux risques d'approvisionnement en énergie que fait peser la guerre russe en Ukraine, mais aussi pour limiter l'impact des catastrophes climatiques, Elisabteh Borne a appelé à la « responsabilité collective » en matière d’économies d’énergie, réclamant à chaque entreprise d’établir son propre « plan de sobriété » dès septembre. Faute de quoi, les sociétés seraient les premières touchées par des mesures de rationnement dans les prochains mois. Le ton est donné…
Mais bien au-delà d’un problème de pénurie d’énergie, c’est bel et bien la question de la protection de l’environnement qui est en jeu et par extension… la nôtre. Dans quelle mesure le monde de l’entreprise peut-il accompagner la transition écologique ?
Pour défendre le « home office », on connait bien l’argument de la productivité et du bien-être au travail, moins celui du changement climatique. Exhumé par le covid, il retrouve aujourd’hui un second souffle pour des raisons bien éloignées de son but initial… Preuve en est, il serait même l’une des pistes envisagées par Emmanuel Macron dans le cadre du plan de « sobriété énergétique ». Mais qu’en est-il exactement ?
On RES-PIRE ! tel est le cri du cœur entonné par bien des citadins durant le premier confinement. Rues désertes, allées fantômes et calme olympien, la nature a repris ses droits de la façon la plus improbable et magique qui soit. Sommés de rester à domicile, 41% des actifs ont adopté le home office ce qui a considérablement limité les déplacements. Et pour cause, la baisse exceptionnelle du trafic routier a fait chuter de 60% les émissions d’oxydes d’azote et de 35% pour le CO2 ! Digne d’un film de science-fiction, la vie a heureusement repris son cours et nous sommes aujourd’hui libres de nos mouvements. Malgré un bilan psychologique lourd et des conséquences économiques sévères, la crise aura eu du bon et cela va dans le sens de l’histoire…
Quand écologie rime avec économie : le combo gagnant
Flex office, home office, tiers lieu, coworking, impossible de passer à côté de ce jargon aujourd’hui démocratisé. A l’heure où la question du bien-être est devenue centrale, l’hybridation apparait comme une réponse pertinente. Outre un meilleur équilibre vie pro/perso, cette organisation est source de richesse pour l’entreprise. Dans cette optique, rare sont les collaborateurs à être présents sur site en même temps, ce qui en découle une baisse de consommation des surfaces et une optimisation des coûts. Constituant un réel segment de marché, les surfaces flexibles croissent de 25% à 30% par an. Aussi, les entreprises sont nombreuses à avoir entamé leur transition, avec à la clé une diminution jusqu’à 40% de mètres carrés. Et les avantages de « l’agilité » sur le portefeuille des entreprises sont notables : une étude de l’ARSEG estime que les acteurs déboursent en moyenne 13.556 € par poste, face au « all inclusive » qui chiffre à 12.216 € sur le marché intramuros parisien du haut de gamme. Un écart de 1000 €/ an par collaborateur, ce qui n’est pas négligeable. L’adoption totale ou partielle de surfaces dans l’univers du flexible est également un pas en faveur de l’environnement…
Premier argument d’une logique implacable, il s’agit de la diminution des trajets domicile-travail. En offrant davantage de flexibilité sur les horaires et une souplesse en termes d’organisation, l’hybridation du travail permet d’étaler les migrations pendulaires et ainsi favoriser un trafic plus fluide. En se basant sur une moyenne de 35% de télétravailleurs ponctuels sur le territoire français, il permettrait de décongestionner les routes et réduire notablement les émissions de gaz à effet de serre (GES). Selon l’ADEME, 3,3 millions de déplacements seraient ainsi évités chaque semaine, économisant ainsi 3200 tonnes de GES dans l’air que nous respirons !
Autres bienfait indéniable, la baisse des consommations énergétiques qui pèsent lourd dans la balance : si l’on considère que les bureaux en France consomment en moyenne à peu près 168 kwh d’énergie par mètre carré par an, ce qui représente 16 kg de CO2 par mètre carré par an, l’hybridation du travail devrait faire décroître les émissions de carbone de façon significative.
Dans un contexte de sobriété numérique, l’hybridation du travail a tout bon si celle-ci est bien pensée et organisée, notamment autour des moments de collaboration. En rendant simple les temps d’échanges où tous les participants sont au siège, les entreprises peuvent réduire le nombre d’appels vidéo et leur impact négatif sur les émissions de gaz à effet de serre. Mais ne nous méprenons pas, le télétravail n’est pas exempt de pollution numérique, il y contribue aussi à sa petite échelle. Ainsi, chacun de nous peut contribuer à limiter son empreinte carbone en adoptant les bons réflexes. Cela passe par l’adoption d’un serveur local ou encore l’usage de l’internet en filaire. Parce que le stockage de données est énergivore par nature, nous pouvons aussi jouer dessus en supprimant tout mails ou fichiers inutiles.
Pour aller plus loin…
A l’heure où l’écologie est devenue une préoccupation majeure à travers le monde, de multiples initiatives voient le jour en entreprise. Plus connecté, plus autonome, mais surtout plus écologique, le bureau et ses stratégies mises en place peuvent contribuer à renforcer la durabilité environnementale.
Qui dit écologique…dit aussi économie circulaire, un marché qui a le vent en poupe. Des grands utilisateurs aux petites structures, elles sont nombreuses à se mettre au « vert », grâce au mobilier reconditionné qui fait fureur. Et pour preuve, la marketplace Bluedigo, spécialisée dans le mobilier d’occasion, a quadruplé son chiffre d’affaires entre 2020 et 2021. Idem du côté des fabricants de mobilier éco responsable, à en croire la société Adopte un bureau. Celle-ci connait chaque année un bond de 30 % à 100% de son chiffre depuis sa création en 2015… Plus qu’un acte écologique au service de la RSE, l’acquisition de mobilier « vert » devient un atout pour booster son attractivité à l’heure où la guerre des talents sévit.
Autre point : dans le cadre du « bureau opéré », réputé pour son offre servicielle, l’exploitant a l’embarras du choix pour faciliter la mise en place de mesures écologiques. Transformer ses locaux en temple du recyclage est aujourd’hui possible avec la startup UZER qui conjugue innovation et sensibilisation : point de tergiversions quant à savoir dans quelle poubelle jeter son pot de yaourt ou sa peau de banane, un petit boitier vous guide en un clin d’œil. A noter que chaque produit recyclé rapporte des points transformables en euro ! Tout aussi engagée, Les joyeux recycleurs proposent aux entreprises d’intégrer des poubelles pour chaque type de détritus qui seront récupérés plusieurs fois par mois. Grace à un reporting annuel, l’impact environnemental est mesurable. Décidée à tordre le cou à l’un des déchets les plus redoutable (12 ans pour se dégrader !), Mego fait aussi un tabac. Cette dernière récupère les mégots des fumeurs de l’entreprise pour les valoriser sous forme de plastique qui deviendront des bancs dans l’espace public. Une chouette idée !
Les entreprises sont dorénavant conscientes de la nécessité d’adapter leurs stratégies immobilières à une nouvelle donne, à la fois plus respectueuse du bien-être de ses collaborateurs que de l’environnement. En s’inscrivant dans cette démarche de travail hybride, elles participent aussi plus largement à redynamiser certains territoires en offrant la possibilité à ses salariés d’embrasser une vie rurale. En plus de réduire les consommations d’énergies et d’améliorer la qualité de l’air, le travail hybride célèbre la vie de quartier et nous ramène à l’essentiel. Moins de gaspillage alimentaire, la possibilité de se concocter de petits plats sains et non transformés … mais surtout une hausse de la fréquentation des commerces de proximité (43 % contre 27 % pour les non-télétravailleurs selon une étude l’ADEME). Cette approche qui alterne présentiel et distanciel enclencherait donc naturellement des cercles vertueux… Serait-ce un début de réponse aux enjeux sociétaux et environnementaux ? Affaire à suivre !